mercredi 7 septembre 2011

ateliers-Souvenirs, souvenirs : ah! cette "bonne" odeur de craie blanche...

Ma première rentrée des classes
 à la grande école.
C’était en … 1949.

En ce temps-là, après les deux mois et demi de grandes vacances, l’école reprenait début octobre. Je venais d’avoir six ans. Je n’étais pas un novice, aguerri  depuis ma plus tendre enfance à l’exercice scolaire par la fréquentation de la maternelle. Je connaissais les lieux : les classes enfantines étaient rattachées à l’école des filles, rue de Lille à Neuville-Saint-Rémy. Avant le 14 juillet j’avais accompagné ma mère pour l’inscription  à l’école des garçons située rue Thiers. Le village, je l’avais tellement exploré depuis des mois! Mes parents n’hésitaient pas à m’envoyer faire les courses dans les différents magasins disséminés aux quatre coins de la commune.
Parce que j’étais grand maintenant et que j’allais apprendre à lire... Je pourrais ainsi continuer de feuilleter en cachette les magazines qui nourrissaient l’imaginaire de ma mère. Leurs photos me captivaient. Ne pas être capable de déchiffrer leurs légendes m’incitait à inventer des histoires certainement étrangères au texte imprimé. Mais tout allait changer. Je comprendrais enfin le pourquoi de l’intérêt de maman pour ces personnages qui s’embrassaient ou se regardaient en chiens de faïence.
L’école de la rue Thiers comprenait trois salles de classe. Le directeur, un homme trapu de petite taille, à l’allure déterminée, comme s’il était né avec son sifflet au cou, portait une longue blouse grise en coton. Il gérait les trois cours : moyen 2, supérieur et fin d’études. Ses élèves les plus âgés dont la plupart le dépassaient d’une tête préparaient le certificat d’études dont l’obtention les enverrait en apprentissage d’un métier ou directement au travail.
La salle occupant le centre du bâtiment de plain-pied était le domaine de celui qui inspirait la terreur à tout le monde, enfants comme parents. On racontait que certains jours la puissance de sa voix tonitruante réprimandant les mauvais élèves la propulsait aux confins de la commune. Ce maître d’école faisait évoluer au pas et à la baguette une trentaine de « zouaves » répartis dans les cours élémentaire 2 et moyen 1.

En revanche, l’instituteur qui m’accueillit dans la petite classe, porteur lui aussi de la blouse grise –un uniforme auquel nous les garçons n’échappions pas, alors que les filles avaient droit à des tabliers brodés élégamment de fleurs et décors des plus fantaisistes-, accorda aux petits nouveaux un maximum d’attention et de patience avant de nous lancer dans le grand bain.
On m’indiqua ma place. Je m’installai donc sur le banc en chêne à deux places, fixé à la table pentue par deux pieds horizontaux reposant sur le carrelage de la salle. La partie supérieure du plan de travail portait une large rainure dans laquelle reposait l’outil merveilleux qui allait me permettre d’écrire. J’ignorais encore que le porte-plume deviendrait parfois un instrument de torture pour les dernières phalanges du pouce, de l’index et du majeur bien souvent imprégnés de cette encre violette, carburant dont étaient si friands les encriers blancs. Les jolis petits récipients occupaient la partie droite de chaque rainure. Haro sur les gauchers !
Dans mon cartable –ma « carnasse » disais-je d’un ton blasé-, un vieux sac de cuir hérité d’un oncle qui avait fait ses classes, et réparé tant bien que mal par le bourrelier, ma mère avait glissé un minimum de matériel. L’ardoise, une vraie de vraie, était déjà condamnée à mort par la prévision de la première chute brutale sur le sol. En revanche, le plumier supportait davantage les mauvais traitements. J’aimais manipuler sa partie supérieure pivotante, son couvercle verni et décoré s’engageant dans une étroite rainure. Une gomme toute neuve occupait le trou cylindrique qui pourrait bien recueillir mes premiers bons-points.

Et la classe proprement dite commença par un concert de percussion de tous ces outils que chacun extirpait du cartable avec fierté. Ce fut le maître qui abrégea le spectacle. L’encre, le porte-plume n’attendaient plus que le cahier à la réglure particulière réservée aux néophytes : deux lignes parallèles rapprochées et une autre un peu plus haut étaient prêtes à recueillir le premier train de ronds et de bâtons. L’instituteur et son sifflet avaient le pouvoir de nous empêcher de dérailler : gare à nous en cas d'erreur d'aiguillage!




Cloclo





1 commentaire:

  1. Souvenir, quand tu nous tiens...l'imagier dans notre tête s'ouvre en grand : l'école, le préau, le tableau noir, les craies qui faisaient grincer les dents et puis un peu de nostalgie, quelques regrets pour certains, un parfum d'enfance, une partie de notre vie, quoi ! Ah, si on pouvait retourner en arrière, (oh, juste un petit peu) rien que pour le plaisir de retrouver quelques sensations oubliées... Bonne rentrée à tous.

    Cricri

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